1-URBANISME
-
Effet des règles d’une OAP sur des constructions existantes
La Cour administrative d’appel de Paris a, récemment, rappelé qu’une OAP ne peut pas contenir des prescriptions relevant du règlement du PLU.
La Cour a précisé qu’une OAP ne peut pas régulièrement imposer une transparence d’un cœur d’îlot ainsi que sa continuité avec l’espace public ou la destruction de constructions existantes (CAA de Paris, 15 mai 2025, n°23PA02162).
-
Attention aux destinations des constructions mentionnées dans le PLU !
⇒Rappel : en matière d’urbanisme, les destinations et sous-destinations des constructions sont limitativement fixées par les articles R. 151-27 et R. 151-28 du Code de l’urbanisme. Les rédacteurs du PLU ne peuvent pas prévoir des règles d’urbanisme spécifiques pour des destinations de construction non-prévues par le Code de l’urbanisme – et ainsi créer de nouvelles destinations (CE, 30 décembre 2014, n°360850).
La Cour administrative de Nancy a, récemment, rappelé ces règles en censurant un PLU ayant prévu des règles de stationnement différentes pour les petits et les grands commerces – les rédacteurs avaient créée des destinations non prévues par le Code de l’urbanisme (CAA de Nancy, 22 mai 2025, n°22NC02259).
Etant précisé qu’il était possible d’aboutir au même résultat que celui souhaité par les rédacteurs du PLU en cause en prévoyant des règles de stationnement/SDP de commerce.
-
Arrêté enjoignant de régulariser sous astreinte : attention à ce qui est demandé au contrevenant !
⇒Rappel : un maire a la possibilité, après avoir émis un PV d’infraction, de mettre en demeure un contrevenant de régulariser des ouvrages réalisés en violation des règles d’urbanisme – dans un certain délai – et sous astreinte financière (articles L. 481-1 et suivants du Code de l’urbanisme).
Le Tribunal administratif de Besançon a, récemment, annulé un tel arrêté de mise en demeure et l’avis émis pour le recouvrement de l’astreinte.
Une personne avait édifié un portail sans déclaration préalable. Le maire a usé du dispositif susvisé et émis un arrêté enjoignant le contrevenant de déposer une déclaration préalable dans un délai de 15 jours et qu’à défaut une astreinte journalière de 10 € s’appliquera.
Le dossier de DP a été déposé dans le délai prescrit mais le maire a, tout de même, procédé à la liquidation de l’astreinte à sa mise en recouvrement en raison du maintien du portail au-delà du délai de 15 jours.
Faisant une lecture stricte des propres décisions du maire, le Tribunal les a censurées en relevant que le dossier de DP avait bien été déposé conformément à l’arrêté d’injonction (TA de Besançon, 28 mai 2025, n°2400394 – 2401326).
Avis : cet arrêté d’injonction est un outil redoutable pour permettre aux communes de lutter contre les constructions non-conformes aux règles d’urbanisme – par contre il est important d’être extrêmement vigilant sur le contenu des régularisations demandées au contrevenant afin d’assurer la pleine efficacité des décisions ainsi que les risques contentieux.
-
Absence d’impact du défaut de transfert de propriété des parties communes sur la validité des statuts de l’ASL
Un lotissement implique, dans la majorité des cas, la création d’une ASL qui sera propriétaire des équipements communs du lotissement et en assurera la gestion. Sauf si la propriété de ces équipements est transférée à l’administration.
Par une décision récente, la Cour de cassation a précisé que le défaut de transferts de la propriété de ces équipements communs à l’ASL n’entraîne pas une nullité des statuts – alors même que les statuts prévoient ce transfert (Cass., Civ. 3ème, 22 mai 2025, n°23-12.480).
Avis : cette décision est intéressante et sécurisante – il n’est pas rare (pour l’avoir déjà vu dans des dossiers) que le transfert de la propriété des équipements communs à l’ASL ne soit pas réalisé dans la foulée de la finalisation du lotissement.
-
Effet du certificat d’urbanisme : application du PLU ancien et du nouveau au choix du pétitionnaire
⇒Rappel : le certificat d’urbanisme positif ou négatif qu’il soit opérationnel ou de simple information permet de geler les règles d’urbanisme applicables au terrain pendant un délai de 18 mois à compter de sa délivrance – sauf pour les règles relatives à la sécurité et à la salubrité publique (article L. 410-1 du Code de l’urbanisme).
Il s’agit donc d’un outil très intéressant pour les porteurs de projet.
Le Conseil d’Etat vient de rappeler ces principes et il ajoute que le certificat d’urbanisme n’oblige pas d’examiner la régularité d’un projet par rapport aux règles d’urbanisme applicables au jour de la délivrance du certificat. Le porteur du projet peut également bénéficier des règles nouvelles en vigueur au jour où il est statué sur sa demande de permis de construire.
Si le projet n’est pas conforme aux règles anciennes en vigueur au jour du certificat mais qu’il est conforme aux règles nouvelles, le pétitionnaire pourra régulièrement obtenir son permis de construire (CE, 6 juin 2025, n°491748).
Cette précision apporte plus de souplesse pour les pétitionnaires dans la définition de leur projet.
-
Modalités de contrôle des changements de destination
⇒Rappel : un changement de destination (par exemple : de bureau à habitation) nécessite, à minima, une déclaration préalable – mais comment appréhender les changements de destination intervenus sur un bâtiment sans autorisation d’urbanisme ?
Le Conseil d’Etat vient d’apporter des éléments de réponse.
Le juge doit tenir compte de la destination initiale du bâtiment et des changements opérés par une autorisation d’urbanisme uniquement.
Exception : pour les changements de destination effectués avant le 1er janvier 1977 – le juge doit se référer à tout changement de destination mais sans autorisation – avant cette date, la législation n’imposait pas de changement d’autorisation d’urbanisme pour un changement de destination (CE, 23 mai 2025, n°476057).
-
Délai de recours : la date de dépôt du recours gracieux fait foi
Le Conseil d’Etat est revenu sur sa jurisprudence antérieure et il n’est plus nécessaire de notifier un recours avant l’expiration du délai. Seule la date de dépôt du recours à la Poste fait foi – indépendamment du délai d’acheminement.
Le Conseil d’Etat étend cette règle pour tout recours émis auprès d’une administration dans tous les domaines et même en cas de dépôt d’un recours contentieux auprès du Tribunal (CE, 30 juin 2025, n°494573).
Il s’agit d’un apport important pour vérifier la recevabilité des recours contre une autorisation d’urbanisme.
-
PC modificatif : la suppression de logement sociaux ne modifie pas la nature d’un projet
⇒Rappel : les possibilités de modifier un projet via un PC modificatif ont été profondément élargies par le Conseil d’Etat – désormais toute modification est possible par un PC modificatif peu importe son ampleur tant que la nature du projet n’est pas modifiée (CE, 26 juillet 2022, n°437765).
Le Tribunal administratif de Bastia a, récemment, annulé un refus de PC modificatif prévoyant la suppression de 28 logements sociaux dans un programme de 112 logements au total.
Les juges ont estimé, contrairement à l’appréciation de la mairie, que cette modification ne changeait pas la nature du projet et pouvait donc faire l’objet d’un PC modificatif (TA de Bastia, 1er juillet 2025, n°2300593).
- Constat de caducité d’une autorisation d’urbanisme : attention au respect d’une procédure contradictoire
Le Conseil d’Etat vient de préciser les modalités à respecter pour constater la caducité d’une autorisation d’urbanisme en raison de l’écoulement du délai de validité :
-En l’absence de commencement de travaux : l’administration peut émettre une décision constatant la caducité de l’autorisation d’urbanisme dès lors que le délai de validité est écoulé sans autre formalité ;
-En cas de commencement de travaux : l’administration doit mettre en œuvre une procédure contradictoire informant au préalable le pétitionnaire qu’une décision de caducité est envisagée en expliquant les raisons de fait et de droit pour qu’il puisse présenter des observations.
Si le pétitionnaire ne formule aucun élément de nature à éviter la caducité – l’administration émettra, ensuite, une décision constatant cette caducité.
Dans tous les cas, la décision constatant la caducité doit être motivée en fait en droit (CE, 1er juillet 2025, n°502802).
⇒Pour rappel : le commencement de travaux au cours de la période de travaux peut interrompre le délai de validité. Mais il faut que ces travaux soient effectifs et suffisants – la jurisprudence se montre très rigoureuse en la matière. Le simple dépôt d’une DROC ou des travaux de terrassement sont insuffisants.
-
Confirmation de la définition d’une extension
En l’absence de définition prévue par le document d’urbanisme (PLU, PPR…) l’extension doit s’entendre comme un agrandissement de la construction existante mais de dimension inférieure et disposant d’un lien physique et fonctionnel avec la construction existante (CE, 18 juillet 2025, n°492241).
Le Conseil d’Etat avait déjà statué dans le même sens (CE, 9 novembre 2023, n°469300).
-
Droit de préemption urbain et justification d’un projet :
⇒Rappel : le droit de préemption urbain permet à une collectivité locale dans les zones urbaines et à urbaniser de préempter les biens mis à la vente – dès lors que ce droit de préemption a été érigé.
La mise en œuvre de ce droit de préemption implique pour la collectivité de justifier de l’existence d’un projet d’intérêt général qu’elle envisage de réaliser avec le bien en cause.
Le Conseil d’Etat avait précisé qu’il n’est pas nécessaire que les caractéristiques précises du projet soient arrêtées au jour de la préemption afin de valider la décision – il faut que le projet soit mentionné dans la décision (CE, 7 mars 2008, COMMUNE DE MEUNG-SUR-LOIRE, n°288371).
Il semble que le Conseil d’Etat a, récemment, précisé que l’administration doit, tout de même, faire apparaître un projet qu’elle envisage de mettre en œuvre. Elle ne peut pas se contenter de viser des objectifs que l’acquisition du bien permettrait d’atteindre comme : la résolution de l’habitat insalubre – la densification de parcelles disponibles – ou faire varier l’habitat vers d’avantage de logements sociaux.
Dans cette affaire, l’administration évoquait uniquement des objectifs de politiques publiques sans projet – le Conseil d’Etat a censuré la décision de préemption (CE, 8 juillet 2025, n°501970).
-
Délai de prescription et pouvoir d’injonction du maire pour les constructions illégales
⇒Rappel : le maire peut par arrêté enjoindre une personne ayant réalisé des travaux non-conforme aux règles d’urbanisme à régulariser dans un certain délai et prévoir une astreinte en cas de retard (articles L. 481-1 et suivants du Code de l’urbanisme).
Cette action implique l’émission d’un PV d’infraction et le maire peut agir même si l’action pénale est classée sans suite.
Cependant, les dispositions du Code de l’urbanisme ne prévoient aucun délai pour la mise en œuvre de ce pouvoir et le Conseil d’Etat vient de préciser que ce délai est de 6 ans à compter de l’achèvement des travaux illégaux.
Il s’agit du délit de prescription du délit de construction non-conforme aux règles d’urbanisme (CE, avis, 24 juillet 2025, n°503768).
- Délai de prescription et pouvoir d’injonction du maire pour les constructions illégales
Le Conseil d’Etat juge que la règle de distance minimale entre deux constructions sur un même terrain ne s’applique pas pour deux façades perpendiculaires – elles ne sont pas en vis-à-vis et même s’il y a des vues d’un bâtiment sur l’autre (CE, 24 juillet 2025, n°479690).
2-CONTRATS ET MARCHES PUBLICS
- Les travaux supplémentaires demandés par mail doivent être payés !
⇒Rappel : les travaux supplémentaires demandés par le maître d’ouvrage et/ou le maître d’œuvre à l’entreprise doivent être payés même s’ils n’ont pas été demandés par ordre de service. Les travaux supplémentaires doivent également être payés même s’ils n’ont pas l’objet d’une demande dès qu’ils sont indispensables à la réalisation de l’ouvrage dans les règles de l’art.
Faisant application de ces principes, la Cour administrative d’appel de Paris a admis que des travaux supplémentaires demandés par un mail émanant de la maîtrise d’ouvrage et ayant reçus un visa conforme de la maîtrise d’œuvre doivent être payés (CAA de Paris, 16 mai 2025, n°23PA03909).
⇒Avis : le maître d’ouvrage doit donc être vigilant sur les envois de toute sorte pour solliciter des travaux supplémentaires – car l’entreprise pourra solliciter le paiement – ou prévoir une procédure spécifique de demande des travaux supplémentaires par les pièces particulières du marché excluant tout paiement de demande émises par un autre canal que l’ordre de service.
- Possibilité d’appliquer le CCAG-travaux de 2009 qui ne prévoit pas le DGD tacite !
La Cour administrative d’appel de Versailles a, récemment, jugé que les pièces particulières d’un marché public de travaux peuvent régulièrement prévoir l’application du CCAG-travaux de 2009 même s’il a été abrogé.
L’acheteur peut ainsi disposer d’un CCAG qui ne prévoit pas la possibilité du DGD tacite (CAA de Versailles, 12 juin 2025, n°23VE00022).
- Intérêts moratoires et transaction
⇒Rappel : les intérêts moratoires viennent s’appliquer pour tout retard de paiement d’une somme due en exécution d’un contrat de la commande publique. Actuellement ce taux correspond à celui de la BCE majoré de 8 points.
Très récemment, le Conseil d’Etat a précisé que ces intérêts moratoires s’appliquent également pour une somme due par un acheteur au titulaire d’un marché en exécution d’une transaction conclue entre les parties pour résoudre amiablement un litige (CE, 22 juillet 2025, SOCIETE NGE, n°494323).
- Attention à la taille maximale des fichiers pour une offre
Un centre hospitalier avait lancé un appel d’offres pour l’achat de dispositifs médicaux.
L’offre d’un candidat a été écartée comme étant irrégulière sans être notée car la taille du fichier faisait 1 323 Mo ce qui dépassait la limite autorisée de 1 Go.
Le candidat a initié un référé contractuel et le Tribunal administratif de Paris a censuré son éviction et inviter l’acheteur pour les raisons suivantes :
-Le candidat justifiait avoir tenté de déposer son offre à plusieurs reprises avant la date limite sans y parvenir ;
-Les documents de la consultation ne précisaient cette limite de 1 Go et le candidat n’avait reçu aucun message d’erreur formulant cette limite lors du dépôt de son offre.
Le juge a imposé à l’acheteur de réintégrer le candidat évincé dans l’analyse des offres s’il souhaite poursuivre le consultation (TA de Paris, 15 juillet 2025, n°2515742).
- Défaut de transmission d’un projet de décompte et DGD tacite
Le Conseil d’Etat a, récemment, précisé que le défaut de notification d’un projet de décompte final au maître d’œuvre en application de l’article 13.2.2 du CCAG-travaux empêche la naissance d’un DGD tacite prévu à l’article 13.4.4 du CCAG-travaux (CE, 11 juillet 2025, SOCIETE SYSTMES WOLF, n°502377).
-
Concession et délégation de service public : l’autorité concédante peut limiter le nombre de lots pour lesquels un candidat peut présenter une offre
Alors même que le Code de la commande publique ne prévoit pas cette possibilité, l’acheteur peut appliquer cette limitation pour la passation des contrats de concession et de délégation de service public.
Seules exigences : les documents de la consultation doivent le mentionner – cette limitation doit être justifiée par rapport à l’objet du contrat (CE, 15 juillet 2025, n°490592).
3-RESPONSABILITE
-
Responsabilité de l’administration : contours de l’obligation de faire disparaître les causes du dommage
⇒Rappel : Le juge peut enjoindre une administration de réaliser des travaux permettant d’endiguer un dommage consécutif à des travaux publics ou à un ouvrage public (CE, 6 décembre 2019, n°417167). Cette demande peut prospérer uniquement si elle s’accompagne d’une demande d’indemnisation (CE, 12 avril 2022, avis n°458176).
Le Conseil d’Etat a encore restreint cette possibilité en imposant que les conditions d’engagement de la responsabilité de l’administration soient toujours existantes au jour où le juge statue. Notamment le dommage subi par la victime. A défaut, le juge ne peut enjoindre l’administration à réaliser des travaux (CE, 28 mai 2025, avis n°499094).
Le cabinet INITIO AVOCATS intervient en droit de l’urbanisme et accompagne les collectivités locales et les opérateurs privés de l’immobilier pour la sécurisation de leurs projets.