1-URBANISME
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Cristallisation des règles d’urbanisme et validité de DP de division parcellaire
Dans cette affaire, une déclaration préalable avait été obtenue pour la division d’un terrain en quatre lots dont trois à bâtir. Il s’agissait d’un lotissement en application du Code de l’urbanisme.
Par cet arrêt, le Conseil d’Etat a rappelé que :
-La durée de validité d’une DP de division parcellaire est de 3 ans à compter de la délivrance de l’autorisation – ce qui implique que la division ait été effectuée et qu’il y ait eu un transfert de propriété ou de jouissance des lots objets du lotissement durant ce délai (article R. 424-18 du Code de l’urbanisme) ;
-Une telle division parcellaire entraîne un gel des règles d’urbanisme applicable au jour de l’obtention de la DP pendant 5 ans (article L. 442-14 du Code de l’urbanisme).
Dans cette affaire, une DP de division parcellaire avait été obtenue mais les lots à bâtir n’ont pas été cédés dans les 3 ans de validité – le Conseil d’Etat en a déduit que les acquéreurs des lots ne pouvaient plus se prévaloir du gel des règles d’urbanisme.
Le Conseil d’Etat en a profité pour préciser que la signature d’un compromis de vente sous condition d’obtention d’une autorisation d’urbanisme suffit à justifier d’un transfert de propriété (CE, 17 février 2025, n°493120).
- La prescription du délit pénal de construction illicite n’empêche pas de mettre en demeure de régulariser
⇒Rappel : un maire peut par simple arrêté mettre en demeure un contrevenant de régulariser une construction non-conforme aux règles d’urbanisme dans un certain délai et assortir cette injonction d’une astreinte financière (article L. 481-1 du Code de l’urbanisme).
La mise en œuvre de cet arrêté nécessite une procédure contradictoire préalable permettant au contrevenant de présenter des observations et l’émission d’un PV d’infraction. Le délit pénal de construction non-conforme aux règles d’urbanisme se prescrit en 6 ans à compter de l’achèvement des travaux (article 8 du Code de procédure pénale).
Apport : par un jugement récent, le Tribunal administratif de Nice a précisé que ce dispositif pouvait être mis en œuvre même si le délit pénal de construction illicite est prescrit – soit plus de 6 ans après l’achèvement (TA de Nice, 15 janvier 2025, n°2300262).
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Mise en demeure de replanter des arbres : c’est possible
La Cour administrative d’appel de Nancy a, récemment, jugé que l’arrêté de mise en demeure susvisé (article L. 481-1 du Code de l’urbanisme) peut être utilisé pour mettre en demeure un contrevenant de replanter des arbres arrachés en méconnaissance des dispositions du PLU (CAA de Nancy, 6 février 2025, n°22NC00815).
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Suspension d’une annulation de PLU : c’est possible
La Cour administrative d’appel de Versailles avait prononcé l’annulation partielle d’un PLU.
Une telle décision fait renaître automatiquement le document d’urbanisme antérieur qui redevient opposable sur le territoire concerné (article L. 600-12 du Code de l’urbanisme).
Le Conseil d’Etat a été saisi d’un pourvoi contre cette décision et la collectivité a émis une demande de sursis à l’exécution de l’arrêt d’appel afin qu’il soit suspendu le temps du traitement du pourvoi.
La Haute juridiction administrative a fait droit à cette demande car l’application du document d’urbanisme antérieure allait générer des conséquences difficilement réparables en rendant constructible des parcelles devant être classées en zone naturelle par le nouveau PLU (CE, 10 février 2025, COMMUNE DE LOUVECIENNES, n° 498134).
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Conséquences de la déclaration d’illégalité d’un PLU sur les autorisations d’urbanismes délivrées
En cas d’annulation ou de constat d’illégalité d’un PLU, les autorisations d’urbanisme délivrées sont remises en cause uniquement dans les cas suivants :
-Si les motifs d’annulation ne sont pas étrangers au projet en cause – à savoir qu’ils portent sur des règles directement applicables au projet ;
– S’il s’agit d’une illégalité externe (procédure d’élaboration du PLU ou de forme) – elle ne concerne pas le projet en cause sauf si cela a exercé une influence sur l’application d’une règle de fond du projet.
Dans le cas où le projet est remis en cause, le document d’urbanisme antérieur s’applique et le requérant qui souhaite contester l’autorisation d’urbanisme doit démontrer que le projet n’est pas conforme à ce document d’urbanisme antérieur (articles L. 600-12 et L. 600-12-1 du Code de l’urbanisme).
Le Conseil d’Etat a récemment rappelé ces règles (CE, 5 mars 2025, n°494321).
- Autorisation de l’occupant pour vérifier la conformité des travaux dans une habitation
⇒Rappel : depuis la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018, les services de l’urbanisme doivent disposer de l’accord écrit préalable de l’occupant d’une habitation pour vérifier la conformité de travaux par rapport aux règles d’urbanisme (article L. 461-1 du Code de l’urbanisme).
Par une décision récente, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a indiqué que cette exigence ne s’applique pas pour des constats réalisés avant l’entrée en vigueur de cette loi (Cass., Crim., 14 janvier 2025, n°24-81-078).
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Droit de préemption urbain : le notaire est réputé être le mandataire du vendeur
Le Conseil d’Etat a, récemment, précisé que le notaire du vendeur est présumé agir en qualité de mandataire du vendeur dans le cadre de l’application du droit de préemption urbain.
La signature de la Déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA) vaut mandat et cela signifie que l’administration peut régulièrement notifier la décision de préemption au notaire. Cette notification fait courir les délais de recours et ceux applicables au droit de préemption urbain.
Il s’agit d’une présomption simple pouvant être renversée par tout moyen (CE, 7 mars 2025, n°495227).
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Référé suspension : difficile démonstration de la condition d’urgence pour un refus de PC
⇒Rappel : le référé suspension permet de suspendre l’exécution d’une décision administrative dans l’attente de la décision du Tribunal au fond. Ce recours nécessite de démontrer les conditions cumulatives suivantes : un doute sérieux sur la légalité de la décision et une situation d’urgence (article L. 521-1 du Code de justice administrative).
Le Conseil d’Etat n’a pas retenu la condition d’urgence pour un recours contre un refus de PC :
-La situation financière difficile des requérants n’était pas établie ;
-L’obtention d’un PC provisoire suite à une décision de suspension émise par le juge des référés ne permet pas aux requérants de vendre leur bien à bref délai (CE, 4 février 2025, COMMUNE DE CONTES, n°494180).
2-CONTRATS ET MARCHES PUBLICS
- Quelles conséquences financières de la résiliation pour faute sur les prestations devenues inutiles en raison de la résiliation ?
⇒Rappel : un marché public peut-être résilié unilatéralement pour faute du titulaire. Dans ce cas, le prestataire ne peut prétendre à aucune indemnisation et la personne publique peut obtenir l’indemnisation des préjudices consécutifs. Ce principe est actuellement repris par l’ensemble des CCAG – et il est applicable même si aucune clause du marché ne le prévoit.
Dans cette affaire, une commune avait prononcé la résiliation pour faute d’un marché de conception-réalisation relatif à la construction d’un parc de stationnement aérien.
La société sollicitait le paiement de prestations d’études réalisées avant la résiliation du marché – la commune refusait de payer car ces études car elles étaient devenues inutiles en raison de la résiliation.
En première instance, le Tribunal administratif de Toulon avait fait droit à la demande de la société et la Cour administrative d’appel de Marseille avait annulé ce jugement et rejeté la demande de la société.
Le Conseil d’Etat a jugé que le prestataire pouvait d’obtenir le paiement des prestations réalisées en exécution du marché avant la résiliation – même prononcée pour faute.
Il a indiqué que si la commune souhaite éviter ce paiement, elle doit démontrer que les fautes de la société ont rendu ces prestations inutiles et ainsi engager sa responsabilité contractuelle (CE, 25 février 2025, n°490616).
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La résiliation pour faute est-elle possible si le titulaire fait intervenir des salariés non-francophones ?
La Cour administrative de Toulouse a, récemment, répondu par la négative.
Les juges d’appel ont retenu que les clauses du marché ne contenaient aucune exigence particulière dans ce sens et que cette situation ne présentait pas une gravité justifiant la résiliation pour faute (CAA de Toulouse, 4 mars 2025, n°23TL00143).
- Délai standstill et procédure de concours
⇒Rappel :
-Qu’est-ce que le délai standstill? Les acheteurs soumis au Code de la commande publique doivent respecter un délai entre la date d’envoi de la décision de rejet d’une candidature ou d’une offre et la signature du marché avec le lauréat ;
-Quel délai ? ce délai est de 11 jours en cas d’envoi des lettres de rejet par voie électronique et 16 jours en cas d’envoi papier ;
-Pour quelles procédures ? Cette exigence est obligatoire uniquement pour les marchés passés selon une procédure formalisée et pour lesquels un avis de marché doit être publié au JOUE ;
-Pourquoi ? Cette formalité a pour finalité de permettre aux candidats évincés d’initier un référé précontractuel (article R. 2182-1 du Code de la commande publique).
Une commune avait initié une procédure de concours de maîtrise d’œuvre restreint pour la construction d’une nouvelle médiathèque.
A l’issu du concours, le maire a désigné comme lauréat les deux groupements de maîtrise d’œuvre ayant été classés en première et seconde position par le jury de concours. Le maire a engagé des négociations avec chacun d’entre eux et attribué, suite à cette négociation, le marché au groupement ayant été classé en seconde position par le jury de concours.
L’autre groupement a initié un référé précontractuel en soulevant que la commune n’avait pas respecté le délai standstill.
Le Juge des référés du Tribunal administratif de Dijon a rejeté cet argument et le Conseil d’Etat a été saisi.
La Haute juridiction administrative a retenu que le marché conclu avec le lauréat d’un concours de maîtrise d’œuvre n’est pas passé selon une procédure formalisée et ne nécessite pas la publication d’un avis de concours.
Le délai standstill ne s’applique donc pas pour ce type de marché (CE, 13 mars 2025, n°498701).